Insuffisance des fonds alloués par l’État aux écoles publiques : des directeurs d’établissements déjà mécontents

Le Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) a récemment rappelé les frais de contribution scolaire fixés pour l’année scolaire 2024. Cependant, bien que le MENFP insiste sur la gratuité de l’éducation pour les premiers cycles fondamentaux et limite les frais pour les cycles supérieurs, une question cruciale se pose : les fonds alloués seront-ils suffisants pour couvrir les besoins réels des établissements scolaires publics ?

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Une politique encadrée des frais de contribution scolaire

Pour l’année 2024, le MENFP a réaffirmé que les parents des élèves du 1er et 2e cycles de l’École Fondamentale n’auront aucun frais à payer. L’État s’engage à prendre en charge les dépenses scolaires en allouant un montant de 400 gourdes par élève. Pour les élèves du 3e cycle de l’École Fondamentale et ceux du secondaire dans les lycées publics, les frais de scolarité sont fixés à 1500 gourdes par élève.

Cette mesure vise à alléger le fardeau financier des familles haïtiennes, dans un pays où l’accès à l’éducation reste un défi majeur. Cependant, ce montant, bien que modeste, soulève des inquiétudes quant à sa capacité à répondre aux besoins matériels des écoles.

Les écoles publiques en manque de ressources de base

De nombreux directeurs d’écoles publiques expriment déjà leur mécontentement, estimant que les montants fixés par l’État sont insuffisants pour gérer convenablement leurs établissements. En effet, ces directeurs rapportent que l’État ne leur fournit pas les ressources nécessaires pour le bon fonctionnement de leurs écoles. Des besoins de base, tels que l’achat de craies, de brosses pour effacer les tableaux ou encore la réparation légère des infrastructures avant la rentrée scolaire (peinture, réparation des bancs, etc.), ne sont souvent pas pris en charge.

Dans les pays en développement, les estimations suggèrent qu’un financement minimum de 200 USD par élève par an est nécessaire pour maintenir un système scolaire fonctionnel. En Haïti, les 400 gourdes allouées par élève (environ 3,30 USD) sont largement en deçà de cette norme internationale, mettant en évidence le fossé entre les besoins réels et les ressources disponibles.

Ce manque de soutien oblige les directeurs à se débrouiller seuls. Dans de nombreux cas, ils craignent de devoir demander aux parents des contributions supplémentaires, malgré les directives strictes du MENFP. Cette situation risque de créer un décalage entre les mesures officielles du Ministère et la réalité quotidienne dans les écoles.

Une situation alarmante pour les directeurs d’écoles

L’équipe de Fouye Rasin Nou (FRN) a rencontré certains directeurs, notamment dans les zones rurales des départements du Sud-Est et du Nord. Ces derniers, préférant rester anonymes pour éviter des lettres de blâme, de transfert ou autres sanctions, n’hésitent pas à exprimer leur frustration, estimant que l’État ne les aide pas suffisamment dans la gestion des aspects matériels et opérationnels de leurs établissements. Ils ont également indiqué qu’ils n’ont reçu aucune subvention de la part de leur DDE depuis plus de 2 à 4 ans. Sans un soutien adéquat, ils se sentent pris au piège entre les exigences de l’État et les réalités du terrain. Bien que le MENFP ait fixé des frais de scolarité limités, les directeurs se demandent si ces montants suffiront réellement à maintenir des conditions d’apprentissage adéquates.

Les 400 gourdes allouées par élève des premiers et deuxièmes cycles semblent dérisoires pour couvrir les besoins d’une école publique, surtout dans un contexte de crise économique et de sous-financement chronique des infrastructures éducatives en Haïti.

Un avertissement clair du MENFP pour les contrevenants

Face à ces défis, le MENFP a rappelé que toute violation des directives concernant les frais de scolarité entraînera des sanctions sévères. Les directeurs d’établissements qui tenteraient d’ajouter des frais non autorisés ou de surfacturer les parents seront sanctionnés conformément à la législation en vigueur. Ces pratiques, qui dans le passé ont poussé certains établissements à exiger des montants exorbitants des familles, sont désormais formellement interdites.

Le MENFP souhaite ainsi mettre un terme aux dérives observées dans certains établissements et réaffirmer le principe d’une éducation publique gratuite ou à faible coût. Les Directeurs Départementaux d’Éducation (DDE) sont également appelés à veiller scrupuleusement à l’application de ces mesures dans chaque établissement sous leur responsabilité, afin de garantir le respect des montants fixés par l’État.

Le rôle des Directeurs Départementaux d’Éducation

Le MENFP a également rappelé l’importance du rôle des DDE dans la mise en œuvre et le respect de ces nouvelles directives. Ils sont appelés à s’assurer que les frais scolaires fixés soient respectés et à veiller à ce que les écoles reçoivent les ressources allouées.

Cependant, sur le terrain, de nombreux directeurs d’écoles affirment que les DDE n’apportent pas le soutien attendu. Dans certaines régions, des écoles ne reçoivent pratiquement aucune aide de la part de leur DDE, ce qui complique la préparation des établissements avant la rentrée scolaire. Cette absence de ressources de base, telles que la peinture des locaux ou la réparation des infrastructures, crée une situation critique qui impacte directement la qualité de l’enseignement.

Bien que la politique du MENFP vise à garantir une éducation accessible à tous, l’insuffisance des ressources allouées met en lumière les défis auxquels font face les écoles publiques. Sans une révision des montants ou une aide supplémentaire de la part de l’État, de nombreux directeurs d’établissements risquent de se retrouver dans une impasse. Le MENFP devra prendre en considération ces préoccupations pour garantir une meilleure gestion des fonds et éviter que des frais supplémentaires ne soient imposés aux parents, contredisant ainsi l’objectif d’une éducation gratuite ou à faible coût.
Styve Jean-Pierre/🌴Fouye Rasin Nou (FRN)🇭🇹

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