Le 2 octobre 2024, le président dominicain Luis Abinader a annoncé une déportation massive des Haïtiens vivant en République Dominicaine. 87 ans après le massacre des Haïtiens ordonné par Rafael Léonidas Trujillo, la persécution des Haïtiens semble se poursuivre sous les yeux impuissants des autorités haïtiennes, qui se disputent entre-temps le contrôle du pouvoir.
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!Fouye Rasin Nou — Le calvaire des Haïtiens en République Dominicaine paraît loin de s’achever avec la réélection de Luis Abinader. Son premier mandat avait déjà été marqué par une politique anti-haïtienne, et son second ne semble pas présager de meilleures conditions pour les migrants. De manière symbolique, Abinader a choisi la date du 2 octobre pour annoncer la déportation de près de 10 000 Haïtiens par jour. Cette date rappelle tristement l’ordre donné par Trujillo, 87 ans plus tôt, de massacrer des Haïtiens en République Dominicaine : entre 20 000 et 35 000 d’entre eux avaient péri lors de ce génocide.
Dans la continuité de cette rhétorique anti-haïtienne, le gouvernement dominicain procède déjà à l’arrestation de centaines de travailleurs haïtiens, sans égard pour leurs droits fondamentaux. Certains d’entre eux, bien que titulaires de documents de résidence légale, se retrouvent, eux aussi, déportés. Menottés, entassés dans des espaces insalubres, les migrants haïtiens sont soumis à des conditions inhumaines. Ce traitement a d’ailleurs été dénoncé par Transparency International, qui pointe des pratiques racistes et xénophobes au sein des forces dominicaines.
Un migrant haïtien interrogé par Fouye Rasin Nou a partagé ses inquiétudes : « On vit avec la peur au ventre. Nous avons deux choix : accepter volontairement de retourner en Haïti, ou vivre avec le risque constant d’être arrêté et déporté. Lorsqu’on est capturé, on peut passer une semaine en prison avant d’être renvoyé en Haïti ; pendant ce temps, nous sommes mal nourris et maltraités », a-t-il confié sous couvert d’anonymat.
« Même au travail, le traitement n’est pas meilleur. On ne nous paie pas à temps, contrairement aux autres employés. Cela nous oblige souvent à emprunter de l’argent aux responsables, qui imposent des taux d’usure. Sinon, on risque de ne pas pouvoir subvenir à nos besoins. Sans oublier les injures racistes que nous subissons quotidiennement », a-t-il ajouté.
Ces témoignages reflètent les innombrables difficultés auxquelles sont confrontés les Haïtiens, en particulier ceux en situation irrégulière en République Dominicaine.
Que fait l’État haïtien ?
Bien que la ministre haïtienne des Affaires étrangères Dominique Dupuy ait annoncé plusieurs réunions pour aborder ce dossier, aucune action concrète n’a encore été mise en œuvre pour protéger ces citoyens menacés de déportation. Pendant ce temps, au sein du gouvernement haïtien, la lutte pour le pouvoir politique semble monopoliser l’attention, laissant de côté toute tentative sérieuse d’influencer les décisions dominicaines.
De plus, aucune structure d’accueil ni de soutien aux migrants expulsés n’a été mise en place. De retour en Haïti, ces migrants sont souvent livrés à eux-mêmes, abandonnés par un État incapable de les assister.
En revanche, la situation des Haïtiens en République Dominicaine ne fait qu’empirer, avec des violations constantes de leurs droits fondamentaux. La communauté internationale, les défenseurs des droits humains et les organisations haïtiennes doivent se mobiliser pour exiger la fin de ces abus. Pendant ce temps, l’État haïtien doit se réveiller et prendre ses responsabilités, en protégeant ses citoyens et en leur offrant un soutien concret, tant à l’étranger qu’à leur retour en Haïti. Sans cela, le calvaire de ces migrants se poursuivra, et la République Dominicaine continuera de bafouer impunément les droits des Haïtiens.
Domond Willington/ Fouye Rasin Nou( FRN)